vendredi 20 mai 2011

Suicides de juges

10/02/2011 à 11h32  1217 vues | lien
Juges, profs, gendarmes, flics, employés de France télécom, ouvriers, criez, ne vous suicidez pas !

... parce que si vous vous suicidez, tout le monde s'en foutra... ou presque : 40000 lectures pour mon article sur Florence Cassez; 913 pour celui sur la mort d'un jeune juge à bout d'épuisement et de déception,  qui s'est couché sur la voie ferrée en attendant le train par un petit matin glauque de banlieue.

UN JUGE MÉJUGÉ

Excellent article d'Elsa Vigoureux dans le Nouvel Obs, plus qu'émouvant, sur le suicide d'un juge (et apparemment il n'est pas le seul). Le vulgum pecus ne se doutait pas vraiment de ce que vivent les magistrats, présentés au public comme des rocs inamovibles, un "corps" constitué ultra favorisé... comme le furent autrefois les profs (mais on sait depuis longtemps que ce n'est pas vrai car eux manifestent volontiers).. les magistrats qui, lorsque des couacs surviennent, sont jetés aux lions par le pouvoir même qui leur a savonné la planche, décriés en raison de leur "laxisme" (ce qu'il m'est arrivé de faire !)... couacs cependant annoncés, INCLUS dans  les coupes drastiques imposées à la Justice. Des magistrats entre marteau et table, fusibles (comme les profs) surchargés puis agonis lorsqu'ils faillent et s'effondrent. Dépression, médicaments.. qui ne résolvent rien et parfois agravent (!) Servier le medica-menteur pote à Koko le coupeur (lien) s'y retrouve certes mais...

 Je coupe, tu calmes, je casque OK ?

Les 3 C..  ou "rien ne se crée, rien ne se perd"

Ne pas pouvoir correctement effectuer son travail est la pire des blessures, humiliant, culpabilisant et se voir tacler ensuite justement pour cela enfonce encore plus dans le gouffre. C'est comme si on exigeait que vous couriez après qu'on vous ait entravé bras et jambes et qu'on vous fustigeait de ne pas avoir été aussi rapide que l'urgence l'imposait. (Le pire est lorsque la volée de bois provient d'un public désinformé de bonne foi.) En psy, ça s'appelle le "double bind" ou le double lien (on donne à quelqu'un deux ordres contradictoires du type "obéis-moi -si tu veux que je t'aime-, désobéis !") forme de torture psychologique raffinée qui génère très vite une belle maladie psychique médoc résistante* : le suicide est au bout, surtout si on a tout sacrifié petit à petit sans même s'en rendre compte, par la force des choses, à son beruf.  Plus de famille, d'amis, d'enfants : des dossiers. Et la mémoire encombrée de noms et de chiffres, de drames et de décisions à prendre, toutes également urgentes, les questions qui taraudent... et parfois une erreur. C'est à dire un mort ou plutôt une/des mortes. Normal dans le contexte. Une minute de silence. HL


* Une autre version du double bind est "tu es moche, stupide, sale etc... mais je t'aime" ou, encore, plus sioux "je te le dis pour que tu t'améliores parce que je t'aime" ou, encore encore plus sioux "tout le monde le pense mais personne n'ose te le dire parce qu'ils ne t'aiment pas comme moi." Il n'y a plus qu'à tendre un revolver. Un travailleur à qui on met des bâtons dans les roues et qu'on fustige ensuite parce qu'il n'a pas effectué sa tâche -pour qu'il s'améliore, en lui conservant son poste mais en le surveillant de près- subit à peu près cela. La suite est logique.

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